Nous sommes le et il est Dame de Tréfle - Yi King - Le Livre des changements
Dame de TréfleYi King / Yi Jing

Traits en Mutation : TCHOUNG FOU

 
Tchoung Fou / La vérité intérieure

En haut : SOUEN LE DOUX, LE VENT
En bas : TOUEI LE JOYEUX, LE LAC

Extrait du "Yi King, le Livre des Mutations" de Richard WILHELM, traduit en français par Étienne PERROT

Neuf au commencement signifie :
Au-dessus du lac est le vent : image de la VÉRITÉ INTÉRIEURE.
Ainsi l'homme noble débat les affaires criminelles pour retarder l'exécution des peines.

Le vent meut l'eau parce qu'il peut pénétrer en elle. Ainsi l'homme noble, lorsqu'il doit juger les fautes des hommes, cherche à en pénétrer avec beaucoup de compréhension le sens intérieur et à se former ainsi un jugement plein de sympathie sur les circonstances. Dans l'ancienne Chine, l'administration de la justice tout entière était fondée sur ce principe. La suprême compréhension qui sait pardonner était considérée comme la suprême justice. Une telle attitude ne demeurait pas stérile, car elle visait à causer une telle impression morale qu'un abus d'une pareille mansuétude n'était pas à redouter. C'est qu'elle ne provenait pas de la faiblesse, mais d'une clarté supérieure.

Neuf à la deuxième place signifie :
Une grue criant dans l'ombre.
Son petit lui répond.
J'ai un bon gobelet. Je le partagerai avec toi.

Il est ici question de l'influence involontaire de la nature intérieure de la personne sur des êtres qui nourrissent les mêmes dispositions. La grue n'a pas besoin de monter sur une colline élevée. Même si elle fait entendre son cri tout en demeurant entièrement cachée, son petit entend sa voix, la reconnaît et lui répond. Là où règne une humeur joyeuse, il se présentera un compagnon qui partagera un gobelet de vin avec celui qui est là.
Ainsi se manifeste l'écho éveillé dans l'homme par la sympathie. Là où un sentiment s'exprime en toute sincérité et en toute pureté, là où un acte est la claire expression de la disposition intérieure, ils exercent une influence secrète au loin, et d'abord sur ceux qui sont intérieurement prêts à la recevoir. Mais ces cercles s'élargissent. La racine de toute influence se trouve à l'intérieur de l'être. Quand cela se traduit en paroles et en actes avec une sincérité et une fermeté entière, alors l'influence est grande. L'influence n'est que le reflet de ce qui sort de notre coeur. Toute volonté délibérée de produire une influence ne ferait que détruire cette influence.
Confucius dit à ce sujet : "L'homme noble demeure dans sa chambre. S'il prononce bien ses paroles, il trouve un assentiment à une distance de plus de mille milles : combien plus dans son voisinage ! Si l'homme noble demeure dans sa chambre et ne prononce pas bien ses paroles, il trouve une contradiction à une distance de plus de mille milles : combien plus dans son voisinage !
Les paroles viennent de l'essence de la personne et exercent leur influence sur les humains. Les oeuvres naissent tout près et deviennent visibles au loin. Les paroles et les oeuvres sont les gonds de l'homme noble et les ressorts de son arbalète. Lorsque ces gonds et ces ressorts fonctionnent, ils apportent l'honneur ou la honte. A l'aide des paroles et des oeuvres, l'homme noble meut le ciel et la terre. Ne convient-il pas, dès lors, d'être prudent ?".

Six à la troisième place signifie :
Il rencontre un compagnon.
Tantôt il bat le tambour, tantôt il s'arrête.
Tantôt il sanglote, tantôt il chante.

Ici la source de force ne se trouve pas dans l'essence de la personne, mais dans les relations avec d'autres hommes. Si proches que nous soyons d'eux, si notre centre de gravité dépend d'eux, il est inévitable que nous soyons ballottés entre la joie et le chagrin. Tantôt être transporté au septième ciel et pousser des cris de joie, tantôt être accablé jusqu'à la mort, tel est le destin de ceux qui sont asservis à un accord intérieur avec d'autres hommes qui les aiment. On exprime seulement ici la loi qu'il en est bien ainsi. Le point de savoir si cet état est ressenti comme pénible ou au contraire comme le bonheur suprême de l'amour est laissé au jugement de la personne concernée.

Six à la quatrième place signifie :
La lune proche de son plein.
Le cheval d'attelage va, égaré.
Pas de blâme.

Pour augmenter la force de la vérité intérieure, on doit se tourner vers le haut d'où l'on peut recevoir l'illumination, comme la lune du soleil. Mais il convient, ce faisant, d'observer une certaine humilité, comme le fait la lune qui n'est pas pleine. Quand la lune devient pleine en se plaçant directement en face du soleil, elle recommence aussitôt à décroître. De même que l'on doit être humble et plein de respect en face de la source d'illumination, on doit aussi renoncer aux clans. C'est seulement lorsqu'on poursuit son chemin comme un cheval qui court tout droit sans lorgner du côté de son compagnon d'attelage que l'on possède la liberté intérieure qui fait avancer.

Neuf à la cinquième place signifie :
Il possède la vérité qui relie.
Pas de blâme

On montre ici le prince qui rassemble toutes choses, grâce à la force de sa nature. C'est seulement lorsque sa force de caractère est vaste au point de pouvoir influencer tous ceux qui relèvent de son autorité qu'il est tel qu'il doit être. La force de suggestion doit émaner du souverain. Elle reliera et unira fermement tous ses sujets. Sans cette force centrale, toute union extérieure demeure mensongère et se brise au moment décisif.

Neuf en haut signifie :
Le chant du coq pénétrant jusqu'au ciel.
La persévérance apporte l'infortune.

On peut se fier au coq. Il chante quand vient le matin. Toutefois il ne peut pas voler lui-même au ciel. Il se contente de lancer son cri. Ainsi on peut susciter la foi par de simples paroles. Cela réussit à l'occasion. Mais si l'on persiste dans cette manière de faire, les conséquences sont fâcheuses.